J'ai des tendances
potomaniaques. Je peux absorber des quantités considérables de liquide, et ce, très rapidement. Étant jeune, je pouvais passer au travers de contenants entiers de jus
Lipton à la pêche, qui ne semble malheureusement plus exister. Très chimique, ça a sûrement nuit à ma croissance. J'ai continué à polluer mon corps de liquides nuisibles avec une consommation excessive de
Pepsi, qui n'a pas vraiment diminué depuis.
Je m'appelle Janny et je suis pepsicolique. J'ai le sang brun. Plus tard, à l'adolescence, ma consommation d'alcool se traduisait par une fin de soirée romantique avec la toilette la plus proche. J'ai affiné ma capacité à consommer des boissons alcoolisées depuis, mais il m'arrive encore de lever le coude beaucoup trop rapidement. Dans mes élans de potomanie, alors que j'appréciais beaucoup le contenu du verre que je tenais, j'en suis venue à me lier d'amitié avec le contenant. Les verres. Un verre pour chaque chose, chaque occasion. Dans mon armoire, les verres qui s'y trouvent sont disparates, et c'est très bien ainsi. Chacun sa place, chacun son utilité, aucune discrimination. Les verres de plastiques multicolores pour les jus chimiques, que je choisis en fonction du plus beau mariage de couleurs jus/verre, les bucks de la
Cage aux sports pour la bière, les grands verres de vitre pour le lait au chocolat, les moyens verres de vitre pour le jus d'orange du matin ou pour les
rhum n' coke lors de soirées festives, les tous petits verres pour l'eau nécessaire à propulser les acétaminophènes loin dans mon corps les lendemains de veille. Tout y est, ils existent tous pour une raison, un but. Je me demande comment c'est de l'autre côté de l'armoire, lorsque je n'y suis pas. Est-ce qu'ils s'entendent tous bien ? Qui est à la tête du Conseil des verres ? Est-ce qu'ils craignent les bucks de la
Cage ? Y a-t-il des verres sans scrupules ? Est-ce que certains se demandent s'ils existent d'autres sortes de verres ailleurs ? Est-ce que les verres petits-gros sont une légende pour eux, étant donné qu'il n'y en a pas dans mon armoire, puisque j'ai de trop petites mains pour les tenir efficacement ? Est-ce qu'ils vouent un culte aux tasses, situées au deuxième étage de l'armoire ? Qui est le doyen de tous ces verres ? Qui soigne les blessés ? Qui est une
attention whore qui me murmure un
"prends-moi, prends-moi" à chaque fois que j'ouvre la porte de l'armoire ? Que boivent-ils ? Est-ce qu'ils aiment aller faire un tour dans le lave-vaisselle ? Est-ce que ça équivaut aux glissades d'eau pour eux ou est-ce que c'est un supplice ? Est-ce qu'ils m'aiment ? Est-ce qu'ils considèrent que je bois de façon appropriée ou préfèrent-ils lorsque je les offre à un invité ?
Tant de questions auxquelles je n'ai pas de réponses. Ah, si seulement j'étais l'un d'eux, je pourrais comprendre ! Je pourrais enfin savoir ce qui se passe derrière la porte de l'armoire. Se sentir vide, se faire remplir, pour être à nouveau vidé. Se laver, pour se sentir propre à nouveau. Un cycle comme tant d'autres, un cycle qui ressemble tant aux autres.